Mes amis
Je suis à ma fenêtre. Décembre se décline doucement dans l’arabesque de la froidure. Je pense à toutes ces vies qui fourmillent dans le sillage lumineux des écrans. Je suis un vieil enfant. Qui écrit. Depuis le déluge sans doute. Je pense avec tendresse au grand adolescent que j’étais qui écrivait ses premiers poèmes dans un cahier. Je vous écris aujourd’hui avec toute l’innocence requise. Pour vous remercier encore. De reconnaître mes textes. Mes enfants d’argile. On ne sait jamais vraiment pourquoi on écrit. Pour être lu sans doute sous une veilleuse dans une ville lointaine. A l’heure tardive de nos vies en désordre. Le lecteur prend dans le panier de sa tête une ruche de pain posée sur la table du partage. Ces mots deviennent les siens. Il se reconnaît dans une voyelle. Dans l’énergie d’une phrase. Dans le brouillard d’un verbe. Dans cette tentative d’écrire. Car l’écriture est toujours une ébauche qui s’accomplit dans le regard de l’Autre. Qu’on me donne encore un peu de temps. Que l’hiver foisonne de nouveaux printemps. Je suis à mon poste de vigie. Le galion de la poésie avance doucement sur la glace. Pour atteindre la banquise d’un mois de mai sous les pôles. Votre présence à mes côtés durant ce voyage est l’étoile de l’amitié qui me tombe sur les mains.
© Patrick Chemin Le 10 de décembre 2012