André DU BOUCHET : une lampe dans la lumière aride

carnets 1949 - 1955
Dimanche 18 mars 2012

12 juin

Travail du sourcier

Travail d’agitation dans ce papier blanc ce papier aride travail de prospection (le chercheur d’eau) (comme les Fauves : sans savoir exactement où l’on va, on va en embrassant à la fois le papier et le monde - ce monde hurlant de terreur, courbaturé à force d’être bâillonné, et si calme pourtant je ne dirai pas : en réalité)

***

Le rôle des mots

suivre une ligne parallèle à et donner l’illusion bienfaisante d’accompagner la respiration. (non de la remplacer, toute réflexion faite.)

les impondérables : air, circulation, respiration, etc.

Trop raréfié retrouver le goût de la violence physique.

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Jouissance bornée. Elle borne immédiatement. On ne peut pas écrire des poèmes qui donnent de la jouissance. Ils deviennent incompréhensiblement faibles, s’étiolent immédiatement. La nourriture visible répugne. Les racines, les sources doivent être invisibles. Pas d’odeur de nourriture. Dans le manque de satisfaction. C’est un travail à longue échéance.

***

J’écris debout

tout dévale et pousse encore plus silencieusement

comme des cheveux

alors j’entre dans la broussaille du jour, qui m’écorche

quelques baies rouges

je vais, raclant la terre avec mon carnet

André DU BOUCHET : une lampe dans la lumière aride, Le bruit du temps 2011, pages 27, 46, 59, 166.

Vos témoignages

  • 22 mars 2012 10:36

    Terre nourricière, source d’inspiration, tantôt féconde, tantôt aride. Dans cette immensité, visible et invisible, parfois contre les lois de la nature, le poète donne sens à sa quête d’espoir et de vérité. Il explore sans cesse la matière pour mieux la déceler, la comprendre, la travailler, l’atteindre, s’expliquer « la surface », cette « impression de réalité ». Comme le sillon tracé par le paysan, la ligne du poète n’est qu’une part de la beauté plastique de la nature, de la poésie. Le poète cherche plus encore à dire tout ce que l’invisible comporte : ses origines, son enfance, ses souvenirs, son présent. Cet intime qu’une lampe éclaire pour dissiper ses doutes, ses interrogations, ses troubles. Cette poésie qui le mène vers un chemin incertain et singulier. Ce chemin, le poète le parcours pas à pas, en ligne droite, franchissant toutes les entraves, au rythme de son corps, de son souffle, sans faillir, debout.Terre riche, terre inexplorée, terre bienfaisante, terre aimée.

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