Atelier du Festivalet 2018

Cocon de douceur

un pas de côté dans un institut de beauté
Lundi 25 juin 2018

Un atelier dans l’institut de beauté à Blesle

La proposition

Déjà, le pas de côté, pour moi, animatrice, était ce lieu où le corps devenait le centre, le regard sur soi, jamais simple.
Par la jeune femme qui nous accueillait, je me suis laissée convaincre par ce lieu et sa douceur afin de lui relier un projet d’écriture.
Les participants.es. imprégnées des odeurs fleuries, du rose ancien, des gris marbrés, par la musique douce et toute la liste des massages et du bien-être proposés se sont retrouvés.es. ensuite, confrontées à trois textes amenés à déstabiliser l’impression de suavité et de confort du lieu précédemment visité.

  • un texte de Marie-Hélène Lafon sur l’hygiène des jeunes filles en internat.
  • un texte de Suskind "le parfum" sur les odeurs des rues et des corps au XVIIIe siècle.
  • un texte de Jean England "Dans la fôrêt" sur un massage réparateur d’un traumatisme qui se transforme en moment de sensualité.
    Ecrire un texte où se retrouvaient ces dualités, les impressions de douceurs et l’empreinte des textes dans nos propres histoires ou imaginaires.

Quelques textes

On dit « gagner sa vie » comme si naître n’était pas un gain déjà suffisamment grand ? On devrait plutôt enseigner à regagner son corps. Pour qu’il ne nous échappe pas, pour habiter chaque cellule et faire le deuil de celles qui meurent, se raidissent, se changent en capitons, en rides, en rougeurs.

Reprendre possession de la chair, des os durs et vivants, de l’haleine et du sang. Et être fières, de cet or rouge et puissant, gouttes de rubis carmin qui coulent entre nos cuisses. Sans doute faudra t’il laver à grandes eaux les siècles de honte liée au sang des femmes. Faire disparaître à grandes flammes la cire des cierges allumés pour prier le diable d’expier hors de nous ces désirs sensuels si effrayants pour qui ne les a jamais ressentis, reprendre pied dans la terre pour nous raffermir, réclamer notre droit de jouir, notre droit à être aussi légère que les mots qu’on nous impose.

Je veux la force ET la douceur, la délicatesse ET la détermination. Les mêmes paroles de guerrier que les hommes qui vont en institut de beauté : « Sauvages, préparez le terrain ! En piste ! À l’attaque ! Let’s adventure begin from the power side… » Mais moi je veux des champs de violettes et des nuées d’étoiles autant que des armes. Des promenades sucrées et des aubes délicieuses autant que des totems de loups, d’ours et de tigres !

De quoi avons-nous peur ? Quand on demande à des jeunes filles de se baigner en robes de nuit pour éviter d’éveiller les mauvaises pensées, tandis qu’on incite les garçons à mesurer leur force et la taille de leur appendice, à l’intérieur de qui cherche t’on à faire taire la puissance ?
De la poigne, il en faut, pour mettre au monde des petits, pour supporter les bouleversements que nos marées imposent, pour affronter debout le mépris, pour pousser la porte des « on dit » et regagner nos corps.

Aude Fabulet


La peau vibre au son de tant de mots qui traduisent la peine.
Le corps raidit ses peurs, la souffrance est trop fraîche.
Alors craquer sa peau, lisser les croûtes.
La main devient pinceau quand l’intention est pure.
En un instant volé à toutes les pudeurs,
il accorde à nos âmes fourbues, désincarnées,
le seul plaisir gourmand de se laisser toucher.
Confiture de toute beauté.

Martine Lalanne

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