Fred GRIOT : cabane d’hiver

Dimanche 9 mars 2014 — Dernier ajout samedi 8 mars 2014

Il s’agit d’un journal, tenu du « 19.01.13 » au « 19 .02.13 ». Les titres du premier et du dernier chapitres, « Partir », « Rentrer », indiquent bien qu’il s’agit d’ouvrir/fermer une parenthèse de temps sur ce qui pourrait être un voyage mais se révèle être un séjour. note de lecture Fred Griot, « Cabane d’hiver », par Antoine Emaz

29.01.13 (…) que l’on ne peut vivre et écrire en même temps, sauf à mener un journal ? cela j’aurai pu le savoir avant, peut-être même devais-je le savoir déjà, toujours est-il que c’est là que ça « rentre ». peut-être. que ce genre de chose on ne peut l’écrire que après, avec ce qui reste. je ne sais pas. on verra bien. laissons faire.

immense ciel, lune énorme. au-dessus la voie lactée, notre galaxie.

31.01.13 le temps se couvre peu à peu. il est 11h 30

faire du bois.

manger dans un rayon de soleil, traversant oblique la yourte.

(…) le journal c’est de fait déjà de la littérature et la littérature c’est toujours de la mise en scène, distanciée d’avec son auteur quant elle tient un peu la route. ce n’est déjà plus de la vie. et c’est l’un de mes premiers efforts de ne pas parler de moi, mais depuis moi - et ça, pas d’autre possibilité de faire autrement - même si je n’y arrive que peu. que mal. car il ne s’agit pas de moi ici.

04.02.13 évidemment le fantasme de solitude heureuse et de silence créatif est une illusion. on s’y emmerde même parfois, on le sait, on y croit quand même. et à chaque fois on repart. il y a (quand cela est choisi évidemment) du bonheur là-dedans, du calme de fond, mais pas que, aussi de la trouille parfois, des minutes flottantes, des heures longues, des journées vides.

08.02.13 j’ai l’impression d’écrire de plus en plus mal, peu précis, peu orné, des faits, banals, et non plus une réflexion de fond. c’est que, sans doute, je m’habitue ici peu à peu, que les choses découvertes sont moins nouvelles. même le silence ne m’est plus étonnant.

14.02.13 Ne pas parvenir à se taire, c’est peut-être ça écrire. collecter tout. babiller toujours. dire et nommer maniaquement. au contraire du silence des animaux.

Fred Griot : cabane d’hiver, édition de la revue des ressources, 2013, pages 50, 54-55, 67-68, 83, 101

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