Leslie Kaplan : Les Outils

Mercredi 4 janvier 2012 — Dernier ajout samedi 7 janvier 2012

Condensation : écrire avec la métaphore, qui fait l’économie de la comparaison. Ce n’est pas : je suis comme une vermine, mais : je deviens une vermine. On se sent coupable, comme si l’on était accusé : on a un procès. On se vit comme étranger au monde, exilé, et voilà qu’on est loin de son pays en train d’errer sur les routes, à la recherche de travail. On a l’impression de ne pas appartenir à l’espèce humaine et on prend directement l’une des multiples formes animales possibles, chien, ou taupe, ou singe, ne revenons pas sur la vermine, et on devient même un être étranger au règne animal, « petite bobine », « chose cassée », « espace vide de sens, mais complet dans son genre », qui a un nom, « Odradek », et qui, à la question « Où habites-tu ? », répond en riant : « pas de domicile fixe ». Ainsi le mot devient la chose : on pense une chose, elle existe, et on l’éprouve. Forme particulière du réel du rêve, le mot est pris à la lettre.

à propos de Kafka, Leslie Kaplan : Les Outils, POL 2003, page 68.

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