Paul-Henry VINCENT : Écoute le silence du monde

Dimanche 26 février 2012

Ce petit être arrivé là par hasard. N’a rien demandé. Alors si vous voulez, peut cesser d’exister à vos yeux. Change pas grand-chose à la réalité. Si vous avez mieux comme occupation, alors laissez tomber. Pas grave.

Pas besoin de vous pour exister. Ne vous a pas attendu pour exister. Peut parfaitement exister sans. Voilà ce qui vous agace. Rien à en tirer. Pas intéressants les gens comme ça. On ne sait rien d’eux voilà qui est malheureux. Rien à faire. Vous n’en tirerez rien. Surtout si vous êtes pressés. Oui c’est vrai avec tout ce que vous avez à faire…

Alors laissez tomber. Pas grave.

Dès que vous l’aurez laissé tomber se mettra à exister un peu plus en lui-même.

À fond la caisse. À fond l’existence.

Sans faire de bruit. Sans faire de vagues. Ni vu ni connu la progression à l’abri des regards. Sans remous extérieurs mais gigantesque saut dans les profondeurs.

Voilà sans doute ce qui vous dérange : cette escapade en solitaire.

Sans vous.

*****

  • C’est un enfant… comment dire ? C’est étrange comme il semble éloigné. Ne pas être là avec nous. Dans quel monde vit-il ?

Il nous semble venu d’un autre monde. Donc étranger à notre monde. Étrangement distant.

Comme s’il n’était pas entièrement entré dans notre monde. Entre deux mondes. Être en gène avec nous. Étranger.

  • Moi, je ne parviens pas à le comprendre. Je ne suis pas comme ça, moi. J’aime parler aux autres. C’est important de parler. Comment peut-on vivre sans parler avec les autres ?
  • Il ne semble pas comprendre l’intérêt de la conversation. Ne pas comprendre tous les efforts que nous faisons pour tenter de le joindre par la parole. Ne pas comprendre cet usage qui lui échappe. De la parole.

Paul-Henry Vincent : Écoute le silence du monde, éditions Musimot, 2011, pages 11, 12 et 13.

Vos témoignages

  • michelle foliot 14 mars 2012 16:49

    L’écrit, ce language des mots, quelle influence a t-il sur notre existence ? Comment est-il reçu ? L’écriture nous parvient soit par intéressement soit par hasard. Cependant elle continue à travers le temps son acte de création. Celui qui écrit n’écrit pas seulement pour lui-même mais aussi pour ses lecteurs, car il croit malgré tout qu’un jour il donnera à regarder, à comprendre, à témoigner. L’écrit en principe laisse une trace. La parole elle aussi s’inscrit dans le temps ; les « anciens » ont connu ce temps fabuleux de la transmission orale. Pour moi, l’un et l’autre évoquent souvent un lieu dont il est l’inspiration le plus souvent : un coin de table, un banc, un escalier , peu importe et plus largement, une place , un espace public, un jardin, une gare..L’un et l’autre sont indispensables car ils libèrent et convergent, sous une forme différente, vers la liberté du language, ils permettent d’exister.

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