Proposition
Au cours de l’exposition ExtraBiennales, en janvier 2015 à Brioude, les Tisseurs de Mots ont écrit à l’écoute des œuvres de l’artiste Jean François Contremoulin, son travail de création est à découvrir sur son site.
Proposition : regarder et écouter les aquarelles, écrire un texte qui disent ce que l’œuvre nous transmet, ce qu’elle nous chuchote, ce qu’elle met en mouvement.
Les textes
// pour des raisons techniques, nous nous pouvons pas transcrire aussi fidèlement que nous le souhaitons, la mise en forme typographique des textes poétiques, nous le regrettons. //
acqua…acqua…acqua
sans fange sans poissons sans barques ni matelots sans sirènes eau assourdissante de silence assourdissante de lumière eau absence
flic…flac…floc

gouttes d’eau sur pigment pastel d’une aquarelle surgit rivière sans rive éclabousse vie sans rime
dans quel miroir te mires-tu ? « changer le regard… » me dis-tu ?
ferme les yeux et vois plus vrai que couleur que ruissellent pleurs et sueur pour voir plus loin encore
au-delà du silence au-delà de l’absence par-delà les apparences
voyelles ruisselantes E A U oh combien précieuse pure polluée bénite souillée offerte achetée convoitée volée violée
telle une femme qui frémit
MONTAGNE
Où qu’elle soit la montagne reste la même Parfois tranquille et paisible Aucune âme visible Dans ce silence tangible Plus ou moins abrupts, deux pics se font face Pentes partiellement enneigées Avec des coulures aux reflets de violets dégradés Peut-être était-ce en été Là où les neiges sont éternelles ? Dans ce ciel timoré de bleus et de gris Teinté parfois de vert Un vent léger fait frissonner les cailloux Paysage pacifique dans une nature isolée Où rien ne semble se dégrader Où ici tout est resté figé.

« EN MONTAGNE »
Vastes étendues, Hauts sommets, De la neige à perte de vue, Neige immaculée qui joue avec la lumière. Cette blancheur happe mon regard, me coupe le souffle, me condamne à l’admiration. Le contact des montagnes me réjouit le cœur. Je suis comme éclairci de l’air respiré. J’établis une relation avec la montagne, je m’en imprègne. Je rêve, je suis en paix, je me sens bien vivant dans ce paysage minéral. Je suis seul au monde malgré la présence des alpinistes. Je savoure cet instant magique. Cette palette de couleurs me ravit. Nulle envie de quitter ce paysage enchanteur. J’ignore le froid.
il y a des jours …Ahreuuuu !!! Ahreuuuuu !!!!
Se gonfle le crâne cocotte-minute de neurones épouvantés, trucidés dans leur élan de vie Etouffés avides de sortir de la fournaise alimentée de l’intérieur affolés par le cœur haletant poussés vers un sommet ? lui même chauffé à blanc par un soleil d’été implacable
de « l’écume des jours », légère, joyeuse ne restent que quelques gouttes qui s’échappent d’une oreille l’œil ne voit plus que l’horreur un seul, noir de rage s’essaie à continuer de se regarder L’autre, déjà se referme sur la vision d’un autre visage Aviné ensanglanté Il se refuse NUL CRI ne s’échappe Bouche mutique gonflée d’une vapeur putride seul échappatoire à la démence d’un jour
Il y a des jours AAAHHHREUUU !

Il a ouvert un œil et il a regardé Il a regardé encore et encore Il a regardé devant, il a regardé partout Il a vu avec une telle lucidité qu’il en a été meurtri Sa désespérance le faisait trembler
Il a fermé un œil Il a voulu fermer un œil Ne plus voir, ne plus savoir Mais l’œil s’entrouvrait encore Sa paupière lourde n’arrivait pas à cacher la vérité qui s’imposait à lui La réalité
Il a voulu faire un barrage à ses mots Il a flouté sa bouche pour la faire taire On ne peut pas dire ces choses là Le cri est retombé au fond de lui, indicible Et la colère, la honte, la peur et le désespoir sont restés en lui et l’ont blessé Et le blessent encore …Et me blessent aussi
Minuscule, une cellule éclot la tête en bas ou bien en haut
transparence horizontale

allongée et calme elle ondule printanière bercée par un clapotis musical
le ciel laisse sa chevelure la réchauffer
et elle s’éveille entre deux mondes
un no man’s land lumineux et étroit un espace vide pour s’aventurer aveuglée de lumière
un passage étroit là où, né d’un erreur, le ciel a pleuré
elle passe à pieds secs dans un silence acide.

Découpe d’une étendue immensité à conquérir surface à peine perturbée par frémissements muets qu’une couche de vernis dissimule au regard
la lumière plonge irradie tente d’avaler le blanc tenace le vide tient tête on s’arrange avec l’ignorance
Le temps horizontal s’étire le corps se densifie les herbes paraissent plus grasses on entend le silence et l’absence des ombres

Esprit tourmenté……les sillons de la torture ont creusé ton front…… Regard perdu dans ton fort intérieur….. Quel est ce doute qui t’assaille ? Quelle est cette angoisse qui te torture…..qui te tord le nez…., qui te tord la bouche….., ? Tes yeux s’enfoncent dans leur orbite pour chercher au plus profond……fouiller dans les té-nèbres du tourment et peut-être….. trouver dans ton ciel tourmenté la constellation qui t’emportera dans la lu-mière éblouissante….
Miroir aquatique D’un monde à l’envers
Enigmatique
Envie d’y plonger
S’y perdre Dans les profondeurs assombries

Se laisser engloutir Par les reflets agités Des vibrations colorées
Réagir ressurgir
Lentement s’extirper
Calmement Poser un pied l’autre Sur la surface apaisée De l’eau
Marcher Tout en légèreté
Attraper un pinceau imaginé
Dessiner à la surface du tableau Minuscules Une petite barque
Ramer pour échapper Sans remouds Sans remords
Ce qui tremble
Ce qui tombe souvent

doucement les feuilles de l’arbre se posent comme bateaux légers et partent au loin jolis trois mats vers de vieux ports oubliés pour une fin de vie humide et putride.
Ce qui tombe Bouleversante la pluie nourrit le flux crépite, ténue abreuve, remue d’un incessant mouvement.
Déchire parfois le ciel de lumières et enfin … remonte la brume.
Ce qui tombe les nuées les ombres la nuit la chaleur et le vent. De l’atmosphère il me vient un air ça glisse et accompagne comme mille instruments La symphonie du moment présent.
Ce qui tombe de temps en temps une main un doigt une patte un bec un visage qui se lave un oiseau qui s’étanche… La vie.
Ce qui monte nourrit vient du cœur vient du centre.
La multitude organique festoie en surface et se laisse aller à flotter légèreté.
Ce qui trouble Ce qui trouble Est souvent hors du temps. Ça passe s’efface fugace mais ce qui trouble ce qui trouble fait trace dans les sables mouvants.
pauvre homme
"quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle que l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis…………." immédiatement je pense à Baudelaire Baudelaire qui aurait vieilli un peu une lèpre intérieure lui ronge l’œil droit la bouche, réduite au silence,par un long hurlement se serait tu définitivement , laissant place à une absence opaque une rougeur diffuse incendie l’œil droit indiquant encore quelques tentatives de révolte vite réprimées par l’œil gauche dont la paupière tombante nous donne à voir une résignation désormais acquise un front immense et sans rides donne à l’ensemble un côté juvénile et vient donner une touche de douceur et d’étonnement à cet autoportrait en pleine confusion pour couronner le tout quelques cheveux verdâtres et clairsemés ………… mais à droite , ils sont flamboyants , comme si Lucifer , par moments , soulevait ce crâne pour y touiller la marmite intérieure
si je croise cet homme là dans la rue , je change de trottoir et détourne ma vue , pour fuir son désespoir.
Hélène