parure, vêtements, habit, habiter…

Samedi 13 décembre 2014 — Dernier ajout jeudi 18 décembre 2014

Proposition


§ Mise à disposition d’un ensemble de vêtements, très différents les uns des autres, choisir un de ces vêtements. Invitation à toucher le vêtement choisi, à le sentir, le ressentir. à se rapprocher de lui. Lecture de Jane Sautière, Dressing, Verticales, page 37.

Proposition : écrire un petit texte qui raconte ce vêtement, par des images, des sensations. Essayer de s’écarter de la description « concrète » du tissu, mais plutôt d’évoquer ce qu’il suggère comme sensation.

§§ Lecture de Jane Sautière, Dressing, Verticales, page 130. Imaginer avoir trouvé le vêtement. Tenter de se faire une idée de son propriétaire, qui est-il ? où vit il ?…

Proposition d’écriture : Raconter un moment de la vie d’un personnage, en faisant attention de ne pas tomber dans le cliché. Insérer le petit texte écrit préalablement, l’évocation imagée du tissu.


Les textes

La cravate

au fond du dernier tiroir de la commode de la chambre du fond une cravate comme un secret l’homme l’a portée une seule fois, elle sent la naphtaline il ne l’a pas jetée c’est un licol de cérémonie chic et bleu nuit nuit d’été arrosée un air de valse lente Il n’a plus de rènes autour du coup pas de guide il est de nulle part les années ont passé desséré les noeuds des contraintes le cou libéré, on a pu passer une main sous la chemise caresser l’épaule ronde il a respiré l’air a transformé le mal être en chant il est parti en vacances avec une autre sans cérémonie la gorge de l’homme a ri au fond du dernier tiroir de la commode de la chambre du fond il y a toujours une odeur de lavande d’un autre jardin quinze ans déjà une vie oubliée aucune usure sur une cravate muette.

Marie Paule


Il y aura cette aube ou le sable aura perdu toute chaleur accumulée. L’odeur du suif avec lequel j’aurai graissé les peaux avant de me coucher. Les braises qui s’éteignent lentement avec le lever du jour. Un ciel qui permet encore de garder les yeux grands ouverts. Dans quelques heures, j’enlèverai la veste au dessus de la chemise de coton, et me protégerai de l’ardeur croissante du soleil.

J’ouvre les yeux. Je m’appelle Bhar Faha. A chaque matin, à chaque réveil, après le rêve de la nuit qui m’emporte si souvent au désert, là d’où je viens, là où Dieu m’a fait naître. Je prononce mon nom : Bhar Faha. Preuve de mon existence, de mon humanité.

Je suis loin, loin maintenant, de toute sensation de sécheresse et le froid matinal du désert m’apparaît comme un oasis au milieu de l’humidité de ce cloaque où je suis.

Le gris est devenu la couleur de ma vie. La mer ici n’est pas bleue. Mais sa couleur s’emmêle avec celle du ciel, brouillée, brouillon d’un tableau de tempête.

Devant le mur, je contemple l’horizon qui n’existe que dans mes espoirs. Et plus je touche au but, plus l’espoir devient flou.

Je porte, à même la peau, sur la même chemise de coton, la preuve de mon appartenance. Au dessus, je suis engoncé dans un anorak trouvé il y a deux jours au vestiaire. Je lave dès que je peux ma chemise. Rester propre. Toujours. Avec un filet d’eau au dessus d’une flaque, on se rase. Rester digne et propre.

Il y a juste encore cette veste. Elle sent encore l’odeur de mon errance.

Je regarde la mer et pas très loin, à portée du regard, un phare.

Si j’étais un oiseau. Les oiseaux n’ont pas besoin de papiers pour migrer.

Véronik


« Regarde Mamie, je suis une fée : la fée du printemps. Si je secoue ma baguette magique, ça va faire des fleurs, plein de fleurs sur ton tapis. Regarde, regarde bien… »

Mais où a-t-elle bien pu trouver ça ? Je l’avais gardée alors ? Crépite le feu bouillonne la marmite fumets mêlés : bois, pot au feu Dehors la nuit. Neige… ou pas ? Corps lassé enveloppé d’un ancien printemps solitaire au fond du fauteuil, elle attend Cliquetis des aiguilles laine grise sur fleurs passées Au creux des couleurs fanées Un chat blanc cherche sa place

Cinq ans, drapée dans la trop longue robe de chambre dont les couleurs font ressortir le rose de ses joues et le bleu de ses yeux, elle agite la magique cuillère en bois et, penchée l’une contre l’autre nous cueillons des brassées de fleurs à peine imaginaires.

Des vacances autrefois. Nous avions déjeuné vite, vite. Elle avait recouvert sa fine chemise de nuit de nylon, trop transparente, d’une nouvelle robe de chambre à fond bleu dont les motifs s’harmonisaient aux roses et aux pivoines que nous allions cueillir au jardin, pour faire les bouquets de la « fête Dieu ». Le matin au plus près de sa peau, le soir pour protéger et réchauffer ses vêtements. Elle l’oubliait parfois au fond du placard sous l’escalier et la redécouvrait, un jour, beaucoup plus tard…

Ou alors ?

Ou bien alors, elle se cachait cette robe de chambre ? Pendant combien de temps s’était-elle dissimulée chez moi, à attendre le jour où cette petite fée là, haute comme trois pommes, viendrait lui redonner une autre vie, une vie de magie…

Dominique


Manque de place, il faut trier, ranger le grenier, ouvrir les cartons sans âge, sans étiquette, pour se résoudre à jeter, un peu, peut-être… Parmi le fouillis, un chapeau d’homme appelle la main, masse souple sous les doigts. Une chapka couleur terre brune pour marcher à grandes enjambées dans le vent glacé. Des cristaux de neige l’étoilent et la forêt surgit. Sa fourrure dense et rase évoque l’animal. Alors plus loin que mon regard nostalgique le cerf fier file entre les troncs serrés malgré ses bois immenses, le renard malicieux dessine des chemins de neige, et le loup ? qu’il reste bien caché surtout. Ce simple couvre-chef ranime l’homme, tous les hommes, grand-père, père, mari ou compagnon.Il raconte le silence de l’hiver, le froid de l’absence. Pourtant serré entre mes mains, la caresse de le douce fourrure me réconforte comme l’ours en peluche de l’enfance.

Marie


« Chapeau ma fille » disait ma mère. Béret blanc, béret noir. Bonnet blanc, blanc bonnet….. Le porte vêtements est surchargé de chapeaux, de casquettes. Faut ranger, les soustraire à la poussière et attendre le bon moment pour les ressortir. Leur trouver une place dans l’armoire. Holala ! il y en a beaucoup et certains auxquels je ne pensais même plus. 1 chapeau de cowboy blanc, des chapeaux de paille simples, naturels ou colorés, agrémentés d’ajout de fleurs en tissus ça et là ou disposées en demi-couronne, des chapeaux fantaisie pour accompagner une tenue exceptionnelle : de mariage par exemple , des casquettes en tissus uni ou non. Ils vont aller rejoindre les chapeaux anciens de mes grands-mères et mère : noirs, en paille à petits bords, d’autres en feutre, plus raffinés , tout petits et agrémentés de brillants, avec un fin élastique noir pour bien tenir sur le dessus de la tête. Chapeaux, coiffes de femme , pas de chapeau d’homme sauf 2 bérets noirs de mon père. 1 pour tous les jours et 1 quasi neuf avec 1 étiquette de Basque à l’intérieur pour les sorties. « je ne vous raconte pas l’importance de ces bérets surtout durant la période où ils étaient encore imprégnés de l’odeur de ce père. » Je m’interroge : chapeaux, bérets , casquettes pouquoi m’intéressent-ils ? Pourquoi en avoir autant ?. Offrent-ils la sensation de pouvoir changer de casquette ? Ils sont avant tout et surtout protection. C’est drôle , je me rappelle de mon papa toujours coiffé et aussi de cette grand-mère qui, jeune fille était modiste et créait des chapeaux. M’auraient-ils donné le "virus " du chapeau ?

Celui-là est doux, tel un nuage blanc pour protéger, orner la cîme d’un personnage. Telle 1 galette à la confiture de lait, ta douceur est 1 régal des yeux . Tu disciplines et enjolives cette tignasse qui ondule sous le vent telle la crinière des chevaux en liberté .

Marie-Antoinette


La voiture fait son entrée dans la cour. Il fait nuit. Les lumières extérieures s’allument et nous crions de joie. Tandis que nous sautons à terre, nous entendons ses grosses galoches noires claquées sur le goudron de la cour, et enfin nous apercevons sa silhouette massive s’approcher de nous à toute hâte : nous lui sautons au cou. Il porte son gilet en peau. Il y a d’abord l’odeur des moutons, de la bergerie et de l’étable… Puis vient son odeur, forte, animale mais douce et enveloppante, familière. Il est doux comme une seconde peau. C’est la chanson de Noël que nous chantons à l’unisson, enfermés dans ce petit carré de salle de bain pendant que les parents disposent les cadeaux au pied du sapin. D’une main, il nous emporte à l’intérieur retrouver la mémé qui toute de joie elle aussi nous embrasse. On s’assied autour de la table, heureux de se retrouver, tout simplement…

Marie


Le pantalon

Il ne restait pas grand chose dans la pièce : sa canne, ses aiguilles en bois qui m’avaient tellement impressionnée quand je le voyais faire les nids de paille, et puis là, sur un banc, ce pantalon, qui lui ressemblait tellement que je ne pouvais l’imaginer autrement qu’avec ça. Je le pris dans mes mains, et, le toucher un peu rugueux des fibres du tissu me ramenait à mon enfance, où il avait été tellement présent. Je portai le vêtement à mon nez… les images défilaient, vivantes et envahissantes. C’est l’odeur de la terre qui dominait : la terre mouillée d’octobre à laquelle se mêlait une fragrance de sang, lorsque les chasseurs rentraient avec le gibier encore chaud. La terre sous le pied des vendangeurs qui écrasaient par mégarde quelques grains vagabonds. La terre sèche et poussiéreuse, sous le traîneau qui ramenait le blé pour la batteuse. La terre, sans cesse retournée pour nourrir les animaux et les hommes. Je glissai alors une main dans la poche, espérant y trouver une surprise, un petit quelque chose que j’aurais pu garder là, juste dans le creux de ma main. Mais non, rien. Rien que la douceur du tissu à l’intérieur, plus fin, usé par le passage de sa main de vieillard. Je me retournai pour voir entrer mon frère, qui avait fini de vider la cabane de jardin ; quand il me vit avec le pantalon dans les mains, il se mit à rire, et me demanda ce que je comptais faire du pantalon d’Antoine. « Le pantalon d’Antoine ? ce n’était pas le pantalon de grand père ?

  • Bien sur que non ! Toutes les affaires de grand père ont été enlevées il y a longtemps ». Je reposai le vêtement, tout doucement, sur son banc. Un sentiment de trahison s’empara de moi. Sortir de là, sortir à tout prix, vite ! Mais où étaient donc les enfants ?

Bernadette


La petite robe noire

Nous arrivons chez Clotilde qui, très vite, m’accompagne à ce qui va être ma chambre. « Tu peux ranger tes affaires dans cette armoire-penderie. Je te laisse. » En poussant les cintres où sont déjà des vêtements, je reconnais « la petite robe noire » à l’empiècement de dentelle dans laquelle Clotilde était si belle. Cette robe mettait en valeur ses formes juvéniles et son élégance naturelle.

Quel contraste avec sa totale absence de coquetterie aujourd’hui : pantalon flasque et pull trop grand. Elle était tout autre dans cette petite robe, si belle, si femme ! Elle bougeait différemment, elle marchait différemment et, de toute évidence, se sentait belle. Je la revois esquisser souvent quelques pas de danse, cette robe l’épousait comme une seconde peau, elle rayonnait ! La magie de la petite robe noire !

Rien de magique dans ses vêtements actuels ; qu’y a-t-il de la vraie Clotilde dans ce laisser-aller ?

Je remets dans la penderie la jolie robe noire que je regarde avec nostalgie. Elle avait même osé la dentelle ! Mais ma nostalgie s’évapore quand j’entends la voix joyeuse de Clotilde : « Dépêche-toi ! Il refroidit !

  • Qu’est-ce qui refroidit ?
  • Ton arabica préféré ! » Je suis emportée par le rire éclatant de mon amie et suis complètement rassurée ! Dans sa campagne, son pull trop grand et son pantalon en accordéon, Clotilde est toujours aussi rayonnante et éblouissante de joie de vivre !

Mady


Elle avait marché, marché entre les rails qui semblaient n’aboutir à nulle part, hypnotisée par les deux grosses rayures d’acier fuyant à l’infini. Le sommeil avait dû écrouler son corps après qu’elle eût, dans un ultime effort, enjambé le rail. Des trains avaient dû passer allant vers l’est, ou vers l’ouest selon ; elle n’avait rien entendu. Elle se redressa, se mit debout, reprit sa marche vers sa liberté. Quelques dizaines de mètres plus loin ses yeux aperçurent un petit tas de tissus vite ramassé sans en avoir vraiment envie. Hasard ? Quel hasard avait abandonné ces vêtements près de la voie : une jupe, droite, fines rayures grises, un pantalon de pyjama d’homme à rayures plus larges plus foncées. Rencontre improbable, d’un bagnard et d’une femme, dans un train, avides de s’aimer et jetant par la fenêtre leur passé avec leurs vêtements.

Elle repris sa marche, entre les rails
Bientôt la frontière
Bientôt la liberté espérée

Monique


Amélie

Amélie, Amélie jolie, te rappelles tu ? Te rappelles-tu le premier corsage que tu t’es achetée ?

Il fallait attirer le regard sans s’attirer les foudres paternelles être jolie, pimpante tout en restant traditionnelle sembler très correctement couverte tout en te ressentant dévêtue. Tu as choisi un chemisier couleur chair, parsemé de petites fleurs roses, peu décolleté mais dans un tissu moderne froid et léger comme un courant d’air. Ainsi tu étais vêtue d’un vent fleuri qui cache et s’échappe des mains dès qu’on veut le saisir.

Amélie, Amélie jolie, te rappelles tu ? Te rappelles tu quand nous valsions comme mes mains glissaient sur cette étoffe d’un modernisme vieillot, tellement…tellement que j’ai du les passer dessous…dessous c’était … c’était …. si bon !

Amélie, Amélie jolie, je me rappelle comment tu l’habitais de ton parfum de paille et d’iris ce corsage d’une douceur irritante que je caresse sous l’oreiller voisin, désormais froid.

Bernadette


Objet trouvé

Béret perché sur un piquet de fil barbelé est là, posé. Sur le bord du chemin, sa galette plate toute feutrée se cabosse. Il pend esseulé, mais en bon protecteur des intempéries, il protège le bout de bois abandonné de toute attaque de froid, de vent, de pluie. Un petit bonhomme vient à passer, couvert de pluie et de boue. Et le béret,la belle aubaine ! se retrouve sur sa tête, lui couvre les oreilles. C’est une petite chaufferette qui exhale les parfums mouillés de toutes les têtes qui l’ont porté. Deux heures de plus sous la pluie ce béret est parfait. Arrivé chez lui, Petit Bonhomme pose son couvre chef de communiante prés de la cheminée à plat sur les tommettes. Il retrouve sa rondeur, sa douceur et attend presque qu’on le caresse. Il fume de contentement ! Petit Bonhomme se cale dans son fauteuil fatigué, un bol de lait chaud dans la corolle de ses mains, il observe son compagnon de fortune qui prend une couleur de sucre glace. Un crayon à pointe fine et un bloc de feuille en main, Petit Bonhomme l’esquisse en couvre-théière, en nénuphar s’étalant sur l’onde calme d’un lac. Le dessine aussi en immense vesce de loup dont la peau douce et tendue explose en fumée au moindre choc. Et après tous ses déboires, l’imagine coquet, coiffant une élégante crânement sur le côté. Le temps s’allonge, l’horloge carillonne les heures. Petit Bonhomme est en retard, il a un rendez-vous, prend le béret, l’habille d’un gardénia, l’enveloppe de papier de soie. Petit Bonhomme file dans sa Deudeush, sa grand-mère l’attend. Il lui offre tout sourire, son béret tout propre et presque tout neuf. En fait, Marguerite qu’elle s’appelle, collectionne toute coiffure trouver de ci de là et leur donne une seconde vie. Avec elle rien ne se perd tout se transforme. Un nouveau chapeau, une nouvelle histoire !

Gisèle


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